Autorité de la concurrence : « les prix des matériaux de construction 39 % plus élevés à La Réunion par rapport à la métropole »

Rejoignant les travaux déjà conduits par l’OPMR, l’Autorité de la concurrence (ADLC) a relevé que les prix des matériaux de construction sont en moyenne 39 % plus élevés à La Réunion par rapport à la métropole et de 35 % plus élevés à Mayotte, soit une différence bien plus importante que celle constatée pour le niveau général des prix (+ 7 %) (Pour plus de détails sur les coûts par matériaux, voir les tableaux p. 10 à 15 de l’avis ci-dessous).

Ces prix élevés ont un impact économique important dans la mesure où les matériaux de construction représentent près du tiers du coût de la construction d’un logement dans ces territoires. En réduisant leur niveau à celui de la métropole, ce coût baisserait donc de 12 % en moyenne. La question est cruciale dans un contexte de crise du logement et d’accroissement démographique dans les territoires concernés.

LES RAISONS EXPLIQUANT CES DIFFÉRENCES DE PRIX

Dans les départements et régions d’Outre-mer (DROM), la petite taille des marchés et leur éloignement des principales sources d’approvisionnement sont des obstacles naturels à l’obtention de prix comparables à ceux observés en métropole.

Cependant, ces spécificités ne suffisent pas à expliquer, à elles seules, l’importance des écarts de prix constatés entre la métropole et les DROM. D’autres éléments expliquent également cet écart comme le transport, les difficultés de stockage, la réglementation applicable à la construction et le degré élevé de concentration de certains marchés.

  • Le transport et le stockage, des postes de coûts importants

La grande majorité des matériaux de construction étant importés (380 millions de tonnes à La Réunion en 2014), le transport représente une part importante de leur coût, d’autant qu’ils sont pondéreux et volumineux.

Mais une fois sur place, un autre problème se pose : celui du stockage. En effet, l’économie des DROM se heurte à une problématique commune de rareté du foncier, laquelle se traduit par un manque de locaux de stockage, entraînant un gonflement des loyers commerciaux qui se répercutent sur le prix des matériaux.

À titre d’exemple, les locaux de stockage à Mayotte sont proposés à des loyers d’environ 25 euros/m², contre 7 à 10 €/m² en petite couronne parisienne.

L’Autorité a par ailleurs relevé que certaines entreprises détiennent  des terrains sans les exploiter, entraînant un gel du foncier et un renchérissement de son coût.

  • Des normes inadaptées aux spécificités outre-mer

Il apparaît aux termes de l’examen mené par l’Autorité que les contraintes techniques des chantiers de construction et les normes imposées sont élevées et parfois inadaptées aux habitudes de vie ou au climat tropical de ces territoires renchérissant le coût de la construction.

À titre d’exemple, les normes d’isolation phoniques paraissent peu pertinentes dans des zones tropicales où les portes et fenêtres des habitations non climatisées peuvent rester ouvertes une grande partie de la journée compte-tenu de la douceur du climat.

L’exigence de certification dans les matériaux utilisés génère, pour sa part, une forte dépendance des territoires ultramarins aux importations européennes et en provenance de métropole afin de respecter les exigences de certification CE ou NF. Ainsi, beaucoup des produits importés doivent passer par l’Union européenne afin d’y obtenir la certification.

  • Des marchés très concentrés autour de groupes intégrés

Il ressort de l’instruction qu’à La Réunion et Mayotte un nombre restreint d’acteurs (oligopole) opèrent dans les circuits d’approvisionnement et de distribution des matériaux. Ces opérateurs sont par ailleurs intégrés, c’est-à-dire présents à tous les niveaux de la chaîne de valeur, de la fabrication à la distribution, situation qui ne prédispose pas à une vive animation concurrentielle du marché et rend difficile l’accroissement des parts de marché des concurrents.

A La Réunion les distributeurs de matériaux de construction et les exploitants de magasins de bricolage d’enseignes locales ou nationales sont peu nombreux.

De même, à Mayotte, des importateurs-distributeurs sont présents sur toute la chaine de valeur.

Cette faible animation concurrentielle se constate dans les niveaux de marges commerciales des différents matériaux de construction. A La Réunion, ils peuvent représenter jusqu’à 80 % ou 100 % voire au-delà selon une étude de la Dieccte. Ainsi, les taux de marge dans le ciment peuvent aller jusqu’à 90 % et ils sont en moyenne de 80 % dans les carreaux de céramique (pour plus de détails, voir § 189 à 194).

LES RECOMMANDATIONS DE L’AUTORITÉ

Simplifier la normalisation et la certification

  • Adapter les normes aux contraintes locales

Si plusieurs actions ont été engagées par les pouvoirs publics, il est nécessaire de réaliser une révision ambitieuse du système normatif pour adapter les normes à ces territoires.

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